Corse – Après les derniers accrochages entre jeunes et policiers la semaine dernière, les habitants du quartier expriment leur ras-le-bol et évoquent une situation qui serait à nouveau sur le point d’exploser. Entre deal et incivilités.
(…) À chaque fois, le même scénario : des habitants, excédés par le bruit et les nuisances, alertent la police. La direction départementale de la sécurité publique intervient, les jeunes ripostent et vont jusqu’à l’affrontement. Bilan de l’opération : trois gardes à vue, une condamnation en comparution immédiate à un an ferme et cinq ans d’éloignement du quartier pour Nabil Khallouk, unanimement considéré comme « le meneur » par la justice et les habitants du quartier. Parmi les profils défavorablement connus des services de police depuis des années, ce dernier a été condamné en décembre dernier à 30 mois de détention pour les violences exercées sur les pompiers, au cours de cette fameuse nuit de Noël 2015. Une peine qu’il n’a pas effectuée car il a fait appel du jugement.
(…) « Ce n’est plus un quartier familial », regrette-t-elle. Comme tous les habitants, elle assiste aux valses des petits caïds qui alternent entre prison et liberté. « Lorsqu’on ne les voit plus, vous savez qu’ils sont dedans. L’un d’eux m’a dit l’autre jour « J’étais en vacances, nourri, logé, blanchi ». C’est toujours la même chose, on n’avance pas et on a le sentiment que le principal problème n’est jamais réglé. »
(…) Autre scène surréaliste, racontée par Sylvie, que l’on retrouve dans les banlieues continentales : « Lorsque la police arrive au rond-point du Lætitia, ça siffle dans le quartier et ils fuient tous comme des rats se cacher ! » Les guetteurs, à l’Empereur, « généralement les plus jeunes que l’on paye aussi en chocolats et bonbons », font bien leur travail. « La police sait exactement à qui ils ont à faire, ils ont le pedigree de chacun, dans les moindres détails, ils savent ce qui se passe au quartier mais ça ne s’arrête jamais. Celui qui a été condamné en décembre, et qu’ils ont encore pris, est un danger public », insiste Claude. Lui aussi a demandé que l’on change son prénom, « par peur des conséquences » sur ses neveux et nièces. Il habite pourtant le quartier depuis cinquante ans. Les représailles, Angèle les craint également pour son petit-fils qu’elle vient de récupérer devant les grilles de l’école. « Il est en minorité dans sa classe, argumente-t-elle en montrant l’enfant. Aujourd’hui, la pression s’est inversée et je ne veux pas qu’ils utilisent les enfants pour accentuer les tensions. Je suis dans le quartier depuis trente ans et je n’ai pas de leçon de vivre-ensemble à recevoir. Je suis bien avec tout le monde depuis toujours mais il y a une situation que l’on doit regarder en face », insiste-t-elle avant de préciser : « Après deux, trois ans où le trafic de drogue s’était calmé, tout est reparti aujourd’hui ».