20 décembre 2019 - par Manuel Gomez
5 Maliens, sans papiers et donc en situation irrégulière, étaient employés sur un vaste chantier situé avenue de Breteuil, face aux Invalides, dans le 7e arrondissement de Paris.
L’affaire débute le 6 septembre 2016.
Un manœuvre est blessé à un œil parce qu’il était dépourvu de lunettes de protection. Trois jours plus tard, un ouvrier chute lourdement sur le sol car il était posé sur un échafaudage rafistolé avec des câbles électriques.
Les responsables du chantier refusent d’appeler les secours pour la raison, bien entendu, que ces ouvriers ne sont pas déclarés.
Ces 25 Maliens se mettent en grève et occupent le chantier de l’avenue de Breteuil, ce qui gêne terriblement l’avancement des travaux entrepris par l’entreprise de sous-traitance « MT Bât Immeubles », leur employeur.
« Si vous n’êtes pas contents, rentrez chez vous. Il y en a plein d’autres pour prendre vos places »
Soutenus par la CGT, les conditions dans lesquelles étaient employés ces Maliens sont dénoncées. L’inspection du travail et le défenseur des droits, autorité administrative en charge de la lutte contre les discriminations, ouvrent une enquête et dans leur rapport sont énoncées les conditions de travail, humainement indignes, de ces 25 Maliens : payés de la main à la main, sans contrat et sans protection, bien évidemment (ni gants, ni chaussures de sécurité, ni casques, ni lunettes) et assignés aux tâches les plus pénibles du chantier, dans des conditions souvent très dangereuses.
Ces migrants clandestins et sans papiers sont exploités comme « une force de travail interchangeable. »
Ce mardi, le Conseil des prud’hommes de Paris a accordé des dommages et intérêts à chacun de ces 25 Maliens : chacun recevra une somme de 34 000 euros et environ 3 000 euros de salaire en retard, soit un total d’environ 1 million d’euros.
Bien entendu, ce n’est pas l’entreprise qui les « exploitait » qui paiera, elle a été placée en liquidation judiciaire au mois d’août 2018 et n’était ni présente, ni représentée à l’audience de prud’hommes. Ces sommes seront versées par l’AGS, financé par les cotisations patronales.
Cette décision est appelée à faire grand bruit, car il s’agit d’une première en France. Elle marquera sans aucun doute un sérieux arrêt dans l’exploitation de cette main-d’œuvre illégale, corvéable à merci.
Ne revenons pas sur ce jugement mais tout de même, certaines questions se posent, et doivent être posées !
Ces 25 Maliens, clandestins et sans papiers, ont tous été régularisés et embauchés par une autre entreprise du bâtiment.
Il suffira donc, dorénavant, à de très nombreux migrants clandestins et sans papiers, de se faire embaucher avec des salaires misérables par certaines entreprises, puis d’imiter le scénario décrit plus haut, prévenir la CGT et attendre de percevoir des dommages et intérêts puis d’être régularisés officiellement, et le tour est joué !
Fort heureusement cette décision, qui fera jurisprudence, va faire réfléchir les « employeurs esclavagistes » qui savent, à présent, à quoi s’en tenir.
C’est fort généreux, comme l’est, et l’a toujours été, la France, mais si ces migrants n’avaient pas pénétrés illégalement en France, ils n’auraient pas servi de main-d’œuvre bon marché exploitable par certaines entreprises. Et s’ils avaient été renvoyés dans leur pays d’origine non plus !
Alors qui sont les véritables responsables ?
Manuel Gomez