Cette association est pointée du doigt. Le président de Vies de Paris, Ronald Désir, et deux autres membres, sont accusés de « travail dissimulé » et de « traite des êtres humains », à la suite de 51 plaintes. Ils auraient employé des clandestins de façon dissimulée, en leur imposant un rythme de travail intolérable, des pressions et humiliations. Ils risquent une peine pouvant aller jusqu’à sept ans de prison et 150 000 euros d’amende. Certaines plaignantes ont également indiqué avoir été victimes d’agressions sexuelles, voire de viol, de la part de Ronald Désir. Ce vendredi 21 janvier, le procès aura lieu au tribunal judiciaire de Paris. Et Libération s’est penché sur cette affaire de près
Quand elle décide de venir vivre à Paris en 2018, Kenza (1) est confrontée à un problème de taille. En situation irrégulière en France, cette mère de famille maghrébine – elle ne souhaite pas préciser son pays d’origine – entreprend des démarches administratives mais elle n’a pas d’adresse où recevoir son courrier. Un ami lui recommande une association, «Vies de Paris», qui pourrait l’aider. Cette structure est bien connue dans la capitale : elle prend en charge la domiciliation de personnes sans papiers, comme Kenza. «C’est là-bas que j’ai rencontré M. Ronald Désir, le président. Il m’a tout de suite proposé du travail. Il m’a dit que c’était une association agréée, qui travaillait pour l’Etat français. Il m’a expliqué que ça pourrait permettre de me régulariser», explique la trentenaire à Libération.
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Selon les éléments de l’enquête que nous avons pu consulter, les caisses de l’association étaient en effet bien remplies, notamment grâce à des prestations vendues «quasi exclusivement à [des] personnes en situation irrégulière». Parmi ces activités exercées «à titre lucratif […] et payées en espèces», outre la domiciliation, on trouve aussi la délivrance de formations et de l’«assistance juridique» – facturées jusqu’à 1 800 euros. «Certains conseils juridiques pour accéder à la régularisation étaient délivrés par des sans-papiers eux-mêmes», note Marilyne Poulain, membre de la direction confédérale de la CGT qui a accompagné certains plaignants. «On n’avait pas l’argent pour payer ces formations, mais on nous assurait qu’il fallait la faire parce que ça serait un moyen de trouver du travail ou d’obtenir un titre de séjour. L’association nous demandait de payer 500 euros et on nous disait que si on devenait bénévole, on n’aurait pas besoin de payer le reste de la somme», relate de son côté à Libération Abdel O., un Béninois de 49 ans.