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caisses du privé

  • Retraites : le gouvernement veut piquer dans les caisses du privé

    Publié par Guy de Laferrière le 26 septembre 2023

    C’est la dernière idée de génie du gouvernement : pour honorer ses promesses sans bourse délier, il suffit de piocher dans la poche d’autrui. En l’occurrence, dans les caisses du régime de retraite complémentaire des salariés du secteur privé, l’Agirc-Arrco.

    Tu veux ou tu veux pas, mais tu raques de toute manière !

    Après la mise en place de la réforme Borne, le recul de l’âge légal de départ à la retraite (qui passera, progressivement, de 62 à 64 ans) aura pour conséquence bénéfique une rentrée supplémentaire de cotisations, tout en retardant le moment de payer leur pension aux futurs retraités. Il en résultera une meilleure santé financière du régime Agirc-Arrco, qui pourrait engranger environ 22 milliards d’euros sur quinze ans : un véritable pactole qui viendra s’ajouter aux 68 milliards d’euros de réserves actuelles. Le gouvernement, endetté jusqu’au cou et qui cherche de l’argent partout, lorgne ce bas de laine avec l’appétit d’un loup famélique devant un mouton gras. Le ministre du Travail, Olivier Dussopt, a donc annoncé aux partenaires sociaux gestionnaires des caisses que la « solidarité » leur impose de partager le magot – qualifié d’« excédents » – afin de contribuer à tenir la promesse du gouvernement de revaloriser les petites pensions, inscrite dans la réforme des retraites. Le montant de cette participation serait compris entre un milliard d’euros, pour commencer, et trois milliards, fin 2026. Comme les syndicats se font tirer l’oreille, le ministre les a aimablement avertis : soit ils s’exécutent de bon cœur en inscrivant gentiment le siphonnage dans le nouvel accord-cadre courant sur la période 2023-2026, soit le gouvernement l’inscrira autoritairement dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024. Autrement dit, tu veux ou tu veux pas, mais tu raques de toute manière.

    La « solidarité » a bon dos

    La protestation des syndicats est largement fondée. En effet, d’une part, parce que l’énormité des réserves de l’Agirc-Arrco est illusoire au regard de l’importance des pensions servies : 87 milliards d’euros en 2022. Les 68 milliards de réserves actuelles ne couvrent donc que neuf mois de paiement. C’est une sécurité, pas un magot.

    Et, d’autre part, parce qu’en l’occurrence, la « solidarité » a bon dos. Comme l’a montré une étude réalisée par l’actuaire Jacques Algarron pour l’association Sauvegarde Retraite, les taux de remplacement (montant de la retraite par rapport au dernier salaire) ne cessent de baisser depuis 1993 dans les régimes de retraite complémentaire des salariés du privé, en particulier pour les cadres. En outre, pour maintenir le régime à l’équilibre, les partenaires sociaux ont mis en place un malus, dit « coefficient de solidarité » (la solidarité a, décidément, bon dos), qui contraint, depuis 2019, les salariés à différer leur départ à la retraite au moins un an après avoir rempli les conditions du taux plein et atteint ou dépassé l’âge légal de départ – c’est-à-dire à cesser de travailler à 63 ans au minimum. En bonne logique, l’argent tiré des cotisations versées à l’Agirc-Arrco, qui est prélevé sur le fruit du travail des salariés, doit donc profiter à ces derniers en restaurant les taux de remplacement et le rendement du régime, en supprimant le malus, dont le maintien ne s’impose plus si l’équilibre budgétaire du régime est assuré, et en permettant de constituer davantage de réserves pour faire face à l’avenir.

    En revanche, cet argent n’appartient pas à l’État, qui n’a aucune légitimité pour taper dans la caisse sous prétexte d’honorer des promesses qu’il ne sait visiblement pas comment financer autrement qu’en recourant à une escroquerie aussi manifeste.

    Éric Letty

    Journaliste
     
    Source : bvoltaire