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facteurs

  • “Il a fallu que je me plie aux règles des dealers. On n’est pas à l’abri de recevoir une balle perdue” : des facteurs contrôlés par les narcotrafiquants dans les cités Nord de Marseille

    Publié par Guy de Laferrière le 22 mars 2024

    L’ accès de certaines cités des quartiers Nord de Marseille peut être totalement soumis à des contrôles imposés par des narcotrafiquants devenus maîtres des lieux. En plus de leur propre trafic de drogue, ils en régulent un autre. Celui des allées et venues. Certains services publics y sont directement confrontés. Celle des facteurs en fait partie.

    On ne fait pas ce métier pour mourir sous les balles.” Lorsqu’on signe un contrat pour exercer la profession de facteur, ce n’est pas du tout la première réaction qui vient à l’esprit. Sauf quand on officie dans l’une des cités des quartiers Nord. Parce que là, en effet, le risque est bien réel.

    À chaque fois, on ne peut pas s’empêcher de penser à ça, dit l’un d’eux, car lorsqu’on distribue le courrier dans un hall d’immeuble, on n’est pas à l’abri de recevoir une balle perdue si on doit se retrouver au milieu d’une fusillade à l’encontre de jeunes postés là.”

    Être facteur dans l’une de ces cités, c’est ça. C’est faire sa tournée et assurer un vrai service à la personne avec une certaine appréhension. À un horaire précis aussi. Car il n’est pas rare d’y respecter le timing dicté par les dealers.

    C’est comme ça, relaye-t-on, il faut avoir quitté les lieux avant le début de la matinée.” Le temps et l’espace doivent, ensuite, appartenir à nouveau à une tout autre activité. À partir d’une telle heure, les points de deal se remettent en place. Les guetteurs de même. Il ne faut surtout pas gêner le “commerce”. Et encore, faire son job de facteur équivaut pratiquement à un privilège que les narcotrafiquants vous octroient. Comme si entrer ou non dans tel ou tel quartier s’apparentait à franchir une frontière dans le respect d’une loi locale. Sous contrôle. Ne pénètre pas ici qui veut. Pour être accepté, il faut montrer patte blanche, comme on le dit communément. En l’occurrence, on est au-delà d’une simple expression formulée à la manière d’un bon mot.

    (…)

    Au fil du temps, une fois repéré et identifié, on nous reconnaît et on peut travailler sans problème, parvient à nuancer ce facteur. On nous laisse tranquille.” Sous haute surveillance.

    La Provence via fdesouche

  • Ultra-moderne solitude : La Poste expérimente la fin des tournées du facteur

    Publié par Guy de Laferrière le 11 janvier 2023

    La destruction du service public se poursuit et la gabegie continue en même temps !
    La Poste augmente sans cesse ses tarifs pour un service toujours plus dégradé (avec maintenant la disparition du timbre rouge et des délais rallongés), plus restreint.

    d’Arnaud Florac :

    « France Info à relayé cette assez triste nouvelle : La Poste va expérimenter, dans plusieurs communes de ce qu’il est convenu d’appeler la France périphérique, la disparition des tournées quotidiennes du facteur. D’un point de vue strictement rationnel, cette disparition, pour le moment expérimentale, rassurons-nous, va de pair avec la suppression, depuis le 1er janvier 2023, du timbre rouge, jadis réservé aux courriers urgents. Il n’y a plus que des timbres verts. Et, donc, moins de facteurs.

    Ce changement n’est pas seulement rationnel. Il est aussi – allons-y d’un mot ronflant – ontologique. La lettre est désormais au courriel ce que la nationale est à l’autoroute : d’un côté, il y a le chemin de traverse, la lenteur sympathique, le temps consacré à profiter des choses, à former les lettres comme à la communale sur du beau papier, ou à prendre les virages, la vitre entrouverte sur la campagne en été ; de l’autre, l’ordre de la vitesse, les lignes droites, les fibres optiques, les télépéages et les boîtes saturées d’informations. Georges Pompidou aurait écrit quelque part, en marge d’une note officielle, qu’à côté des autoroutes des Trente Glorieuses, il faudrait laisser de la place aux petites routes et à la flânerie. En tout cas, il s’était ému que l’on abatte les arbres au bord de nos vieilles routes de France. Il aurait sans doute salué la survie de La Poste, pourtant de plus en plus anachronique.

    Et les facteurs, alors ? On les supprime ? Dans l’imagerie populaire, le facteur assure le lien social, par exemple avec le chien qui lui mord les mollets ou avec l’épouse volage (qui donne tout naturellement naissance au « fils du facteur »). Il était le prolongement naturel du colporteur d’autrefois, qui donnait des nouvelles, qui en prenait aussi. En certaines occasions, il découvrait même les petits vieux, morts seuls, dans des maisons loin de tout. Il arrivait à vélo, dans le temps, avec le bruit familier de la sonnette, puis en voiture (comme le facteur antillais des Visiteurs, dont la 4L sera massacrée par un Godefroy de Montmirail en grande forme). Aujourd’hui, c’est souvent en triporteur ou en fourgonnette qu’il apporte les colis. Point de camion blanc antédiluvien comme ceux de nombreux livreurs Amazon, point de colis fragile balancé par-dessus le portail ou carrément volé : le facteur est bien élevé et, surtout, il représente, dans les petits villages, une survivance de l’État, bien peu jacobin quand il s’agit de lien social.

    Yves Montand ne pourrait plus faire la course à bicyclette avec la fille du facteur. L’expérience sera un succès, on l’étendra à tous les jours de la semaine. Puis on n’enverra plus de lettres. Et chacune et chacun, toutes et tous, enfermé.e.s dans l’ultra-moderne solitude que chanta Alain Souchon, mourra seul dans sa petite bulle. Peut-être créera-t-on, pour recycler les postiers, selon une tradition tenace de ce gouvernement, un numéro gratuit pour faire passer la mesurette. Souhaitons seulement que, pour une fois, il ne soit pas vert mais jaune. Ce sera toujours ça. »

    Source BVoltaire