Publié par Guy de Laferrière le 27 janvier 2023
Une idée reçue construite a posteriori et intellectuellement inexacte selon Florence Dupont. Au micro de l’émission “Histoire De”, l’historienne des langues rappelle que déjà, durant l’Antiquité, Rome ne se réduit pas à une identité, mais à une altérité : “le Romain est celui qui vient d’ailleurs”.
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“Il n’y a pas d’identité latine et Rome n’est pas une identité”
Florence Dupont estime qu’il faut déconstruire les discours identitaires que l’on prête trop souvent à la littérature gréco-antique. Selon elle, “rien n’est plus faux que d’admettre l’expression des racines gréco-latines de l’Europe”. Personne ne peut se prévaloir d’être les héritiers naturels de l’Antiquité gréco-romaine puisque s’ils avaient une vocation culturelle, celle-ci était beaucoup plus universelle qu’on ne le pense : “Cet usage d’une identité gréco-romaine est intellectuellement faux. Il y a une utilisation politique vaine. L’Europe occidentale n’a pas le monopole de l’Antiquité. L’Empire romain s’est étendu absolument sur toute la Méditerranée et a servi de transmetteur en apportant toute une tradition des lettres latines (et grecques) qui ont été jusqu’à aujourd’hui exploitées, réinterprétées, mais pas nécessairement de la façon dont nous, en Occident, nous les utilisons à des fins idéologiques.
La culture romaine, s’il y en a une, n’a jamais été restreinte par les limites géographiques induites par ses conquêtes militaires : “Elle s’est transmise au-delà de l’Europe, en Orient, à travers aussi la philosophie islamique. Il n’y a pas d’identité latine et Rome n’est pas une identité. Elle se pensait elle-même comme un grand mélange, un projet, une ethnogenèse, mais absolument pas en une origine ni un passé déterminé”.