Publié par Guy de Laferrière le 05 juin 2023
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Colonisation
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Algérie : accusant l’Assemblée nationale française de faire une «guerre par procuration», des parlementaires ont relancé le projet de loi criminalisant le colonialisme
Publié par Guy Jovelin le 27 octobre 2021
Les tensions entre la France et l’Algérie peinent à s’apaiser, près d’un mois après l’éclatement de la crise entre les deux pays, alors qu’à Alger, des parlementaires veulent déterrer le projet de loi criminalisant le colonialisme. Ils se sont saisis de la question et ont condamné, lundi 25 octobre, la « guerre par procuration» de l’Assemblée nationale française qu’ils ont accusée de se mêler dans les affaires intérieures de l’Algérie.
Les conférenciers ont abordé la question de la criminalisation du colonialisme et la possibilité de relancer le projet de loi de 2010 qui a été bloqué par le gouvernement de l’époque, après avoir suscité de fortes polémiques en Algérie et en France.
Cette possibilité est saluée par le sénateur du FLN, Abdelouhab Benzaim, qui estime, dans une déclaration à TSA, que la criminalisation du colonialisme français « est aujourd’hui un droit naturel » pour l’Algérie.
« Notre pays est tout à fait dans son droit de criminaliser le colonialisme français qui a duré 132 ans. Les Français ont commis en Algérie des actes criminels qui ont fait des millions de victimes et ont procédé à des essais nucléaires (dans le sud du pays), sans parler de l’exploitation de leur des ressources naturelles de l’Algérie », rappelle le parlementaire qui aborde la question des mécanismes et les démarches à suivre devant mener à cette criminalisation. […]
Benzaim estime qu’avec cette loi, l’Algérie veut exiger de la France de reconnaître ses crimes durant la colonisation (1830-1962). «On peut aller même jusqu’à (exiger) l’indemnisation», ajoute Abdelouhab Benzaim. […]
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25 Septembre : Hommage aux Harkis et regard lucide sur la colonisation.
Publié par Guy Jovelin le 21 septembre 2021
La colonisation est un mouvement inévitable de l’Histoire. Sa condamnation actuelle est stupide ou hypocrite. Lorsque des peuples mieux organisés, plus puissants sur le plan militaire, plus avancés par leurs moyens logistiques et techniques veulent trouver de nouvelles ressources, de nouveaux débouchés à leurs produits, de nouveaux territoires pour leur croissance démographique, ou tout simplement affirmer leur force par rapport à leurs rivaux, ils occupent des territoires extérieurs, de simples comptoirs commerciaux parfois, mais aussi d’immenses territoires.
Ainsi en a-t-il été des Grecs et des Phéniciens, des Romains et des Carthaginois, des Espagnols, des Portugais, des Hollandais, des Anglais, des Français, des Allemands et des Russes jusqu’à ce que le monde soit à la fin du XIXe siècle presque entièrement dominé par les Européens, à l’exception notable des Etats-Unis, une ancienne colonie qui depuis est devenue la première puissance mondiale, en pratiquant souvent une forme de colonisation plus subtile sur les anciennes colonies des autres. La colonisation a des effets qu’on peut juger heureux ou malheureux. Les Français ont été, paraît-il, des Gaulois heureusement colonisés par les Romains. Chaque pays a cultivé un style et des méthodes de colonisation qui lui étaient propres. Les Espagnols ont donné une grande place à la conversion religieuse. Les Portugais on fait largement appel à l’importation d’esclaves. Les Hollandais ont mis l’accent sur le commerce. Les Anglais ont poursuivi quatre objectifs avec succès : le contrôle des mers, la recherche de débouchés, des territoires à peupler et d’autres à exploiter. Les Français ont connu deux époques : sous la Monarchie, l’intention économique l’emportait, au XIXe siècle ce fut un mélange de vanité issue de la mélancolie napoléonienne, d’exploitation, peu rentable d’ailleurs, et le tout recouvert par le devoir de “civiliser les peuples inférieurs”. Les résultats sont aussi très contrastés. Les Anglais ont peuplé d’immenses territoires qui permettent à leur culture et à leur langue de dominer l’univers. Ils ont quitté leurs autres possessions sans trop de heurts et en gardant la plupart du temps des rapports corrects avec elles dans le cadre du Commonwealth. Ce fut plus difficile pour les Espagnols qui perdirent leur colossal empire dans la guerre mais qui ont laissé après eux d’immenses régions où l’on parle espagnol et où on est catholique. La colonisation avec continuité territoriale est plus solide que celle qui se fait outre-mer. L’Est de la Russie, l’Ouest des Etats-Unis sont des colonies “incontestables”. Curieusement, les invasions sont considérées comme plus légitimes que les colonisations. La Turquie actuelle, ou l’Algérie sont ainsi de vieilles terres grecque ou berbère, colonisées ou plutôt envahies par les Turcs ou les Arabes.
L’Algérie est le produit des hésitations et des errements de la colonisation française. A la veille de s’écrouler, la monarchie restaurée plante le drapeau blanc fleur-de-lysé sur Alger, pour venger son honneur, mais surtout pour débarrasser la méditerranée occidentale des pirates esclavagistes musulmans qui y ont leur port. La France royale veut y trouver un peu de cette gloire que conserve l’Empire dans la mémoire des Français. En s’enfonçant dans la terre africaine au gré de ses régimes changeants, la France va faire tout et son contraire. Elle va s’abstenir de prosélytisme religieux y compris à l’égard des Kabyles qui avaient pourtant été chrétiens avant l’invasion musulmane. Mais elle va accorder la citoyenneté française aux juifs sans l’étendre aux musulmans, si ce n’est tardivement. Elle va opérer une oeuvre médicale importante qui va permettre à la démographie locale de croître, mais dans le même temps elle va faciliter un peuplement européen en provenance de l’Alsace-Moselle annexée, mais aussi d’Espagne et d’Italie. Elle va réaliser de nombreuses infrastructures qui font de l’Algérie l’un des pays les plus développés du continent. Elle va jusque dans les dernières années de la présence française vouloir le développement économique et social de l’Algérie avec le Plan de Constantine de 1958 à 1963. Avant l’indépendance, 800 000 jeunes musulmans sont scolarisés. Le gaulliste de la première heure, Jacques Soustelle, ethnologue peu coupable de racisme, voulait l’intégration complète des Algériens aux Français. Le général de Gaulle n’y croyait pas et pensait que l’eau et l’huile ne pouvaient que se séparer. C’est ce qui se fit dans le sang avec l’exode des Pieds-Noirs chassés de leur pays, le massacre et la fuite éperdue des musulmans qui avaient fait confiance à la parole de notre pays, ceux qu’on appelle les Harkis. Des dizaines de milliers ont été assassinés dans des conditions horribles. Les autres, avec à leur tête le Bachaga Boualam, qui a été Vice-Président de notre Assemblée Nationale, Français musulmans rapatriés, ont été de vrais réfugiés en France, souvent moins bien accueillis que ceux d’aujourd’hui, lesquels sont surtout des migrants économiques..
Le 25 Septembre leur est dédié. J’ai personnellement participé activement à l’élaboration et aux votes des lois de 1994 et de 2005 instaurant une reconnaissance et une réparation à leur égard. La France, dans cette tragédie, a sali son honneur. La cruauté des traitements infligés aux Harkis au mépris des accords d’Evian par le pouvoir algérien est d’une totale abjection. Il faut aujourd’hui que les Français soient lucides sur ce passé et qu’ils voient en cette journée le signe qu’il est possible à des musulmans d’être des Français à condition de le choisir et de le vouloir vraiment, ce qui est loin d’être le cas de tous les immigrés. Les Harkis et leurs descendants ne sont pas des Français de papier. Ils le sont par le sang, le sang versé.
Source : https://www.christianvanneste.fr/
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Bernard LUGAN : L’escroquerie historique de la « légende noire » de la colonisation
Publié par Guy Jovelin le 09 février 2020
Quand Arte apporte sa pierre
à l’escroquerie historique de la « légende noire » de la colonisationLa chaîne Arte vient de se surpasser dans le commerce de l’insupportable escroquerie historique qu’est la « légende noire » de la colonisation. Or, le bilan colonial ne pourra jamais être fait avec des invectives, des raccourcis, des manipulations et des mensonges.
Regardons la réalité bien en face : la colonisation ne fut qu’une brève parenthèse dans la longue histoire de l’Afrique. Jusque dans les années 1880, et cela à l’exception de l’Algérie, du Cap de Bonne Espérance et de quelques comptoirs littoraux, les Européens s’étaient en effet tenus à l’écart du continent africain. Le mouvement des indépendances ayant débuté durant la décennie 1950, le XXe siècle a donc connu à la fois la colonisation et la décolonisation.
Quel bilan honnête est-il possible de faire de cette brève période qui ne fut qu’un éclair dans la longue histoire de l’Afrique ? Mes arguments sont connus car je les expose depuis plusieurs décennies dans mes livres, notamment dans Osons dire la vérité à l’Afrique. J’en résume une partie dans ce communiqué.
1) Les aspects positifs de la colonisation pour les Africains
La colonisation apporta la paix
Durant un demi-siècle, les Africains apprirent à ne plus avoir peur du village voisin ou des razzias esclavagistes. Pour les peuples dominés ou menacés, ce fut une véritable libération.
Dans toute l’Afrique australe, les peuples furent libérés de l’expansionnisme des Zulu, dans tout le Sahel, les sédentaires furent libérés de la tenaille prédatrice Touareg-Peul, dans la région tchadienne, les sédentaires furent débarrassés des razzias arabo-musulmanes, dans l’immense Nigeria, la prédation nordiste ne s’exerça plus aux dépens des Ibo et des Yoruba, cependant que dans l’actuelle Centrafrique, les raids à esclaves venus du Soudan cessèrent etc.
A l’évidence, et à moins d’être d’une totale mauvaise foi, les malheureuses populations de ces régions furent clairement plus en sécurité à l’époque coloniale qu’aujourd’hui…La colonisation n’a pas pillé l’Afrique
Durant ses quelques décennies d’existence la colonisation n’a pas pillé l’Afrique. La France s’y est même épuisée en y construisant 50 000 km de routes bitumées, 215 000 km de pistes toutes saisons, 18.000 km de voies ferrées, 63 ports équipés, 196 aérodromes, 2 000 dispensaires équipés, 600 maternités, 220 hôpitaux dans lesquels les soins et les médicaments étaient gratuits. En 1960, 3,8 millions d’enfants étaient scolarisés et dans la seule Afrique noire, 16 000 écoles primaires et 350 écoles secondaires collèges ou lycées fonctionnaient. En 1960 toujours 28 000 enseignants français, soit le huitième de tout le corps enseignant français exerçaient sur le continent africain.
Pour la seule décennie 1946 à 1956, la France a, en dépenses d’infrastructures, dépensé dans son Empire, donc en pure perte pour elle, 1 400 milliards de l’époque. Cette somme considérable n’aurait-elle pas été plus utile si elle avait été investie en métropole ? En 1956, l’éditorialiste Raymond Cartier avait d’ailleurs écrit à ce sujet :
« La Hollande a perdu ses Indes orientales dans les pires conditions et il a suffi de quelques années pour qu'elle connaisse plus d'activité et de bien-être qu’autrefois. Elle ne serait peut-être pas dans la même situation si, au lieu d’assécher son Zuyderzee et de moderniser ses usines, elle avait dû construire des chemins de fer à Java, couvrir Sumatra de barrages, subventionner les clous de girofle des Moluques et payer des allocations familiales aux polygames de Bornéo. »
Et Raymond Cartier de se demander s’il n’aurait pas mieux valu « construire à Nevers l’hôpital de Lomé et à Tarbes le lycée de Bobo-Dioulasso ».Jacques Marseille [1] a quant à lui définitivement démontré quant à lui que l’Empire fut une ruine pour la France. L’Etat français dût en effet se substituer au capitalisme qui s’en était détourné et s’épuisa à y construire ponts, routes, ports, écoles, hôpitaux et à y subventionner des cultures dont les productions lui étaient vendues en moyenne 25% au-dessus des cours mondiaux. Ainsi, entre 1954 et 1956, sur un total de 360 milliards de ff d’importations coloniales, le surcoût pour la France fut de plus de 50 milliards.
Plus encore, à l’exception des phosphates du Maroc, des charbonnages du Tonkin et de quelques productions sectorielles, l’Empire ne fournissait rien de rare à la France. C’est ainsi qu’en 1958, 22% de toutes les importations coloniales françaises étaient constituées par le vin algérien qui était d’ailleurs payé 35 ff le litre alors qu’à qualité égale le vin espagnol ou portugais était à19 ff.
Quant au seul soutien des cours des productions coloniales, il coûta à la France 60 milliards par an de 1956 à 1960.Durant la période coloniale, les Africains vivaient en paix
Dans la décennie 1950, à la veille des indépendances, à l’exception de quelques foyers localisés (Madagascar, Mau-Mau, Cameroun) l’Afrique sud-saharienne était un havre de paix.
Le monde en perdition était alors l’Asie qui paraissait condamnée par de terrifiantes famines et de sanglants conflits : guerre civile chinoise, guerres de Corée, guerres d’Indochine et guerres indo-pakistanaises.
En comparaison, durant la décennie 1950-1960, les habitants de l'Afrique mangeaient à leur faim, étaient gratuitement soignés et pouvaient se déplacer le long de routes ou de pistes entretenues sans risquer de se faire attaquer et rançonner.Soixante-dix ans plus tard, le contraste est saisissant: du nord au sud et de l'est à l'ouest, le continent africain est meurtri :
- Dans le cône austral, ce qui fut la puissante Afrique du Sud sombre lentement dans un chaos social duquel émergent encore quelques secteurs ultra-performants cependant que la criminalité réduit peu à peu à néant la fiction du "vivre ensemble".
- De l'atlantique à l'océan indien, toute la bande sahélienne est enflammée par un mouvement à la fois fondamentaliste et mafieux dont les ancrages se situent au Mali, dans le nord du Nigeria et en Somalie.
- Plus au sud, la Centrafrique a explosé cependant que l'immense RDC voit ses provinces orientales mises en coupe réglée par les supplétifs de Kigali ou de Kampala.Si nous évacuons les clichés véhiculés par les butors de la sous-culture journalistique, la réalité est que l’Afrique n’a fait que renouer avec sa longue durée historique précoloniale. En effet, au XIX° siècle, avant la colonisation, le continent était déjà confronté à des guerres d’extermination à l’est, au sud, au centre, à l’ouest. Et, redisons-le en dépit des anathèmes, ce fut la colonisation qui y mit un terme.
Aujourd’hui, humainement, le désastre est total avec des dizaines de milliers de boat people qui se livrent au bon vouloir de gangs qui les lancent dans de mortelles traversées en direction de la "terre promise" européenne. Les crises alimentaires sont permanentes, les infrastructures de santé ont disparu comme l'a montré la tragédie d'Ebola en Afrique de l'Ouest ou la flambée de peste à Madagascar, l'insécurité est généralisée et la pauvreté atteint des niveaux sidérants.
Economiquement, et à l’exception d’enclaves dévolues à l’exportation de ressources minières confiées à des sociétés transnationales sans lien avec l’économie locale, l’Afrique est aujourd’hui largement en dehors du commerce, donc de l’économie mondiale, à telle enseigne que sur 52 pays africains, 40 ne vivent aujourd’hui que de la charité internationale2) Les conséquences négatives de la colonisation
La colonisation a déstabilisé les équilibres démographiques africains
La colonisation a mis un terme aux famines et aux grandes endémies. Résultat du dévouement de la médecine coloniale, la population africaine a été multipliée par 8, une catastrophe dont l’Afrique aura du mal à se relever.
En effet, le continent africain qui était un monde de basses pressions démographiques n’a pas su « digérer » la nouveauté historique qu’est la surpopulation avec toutes ses conséquences : destruction du milieu donc changements climatiques, accentuation des oppositions entre pasteurs et sédentaires, exode rural et développement de villes aussi artificielles que tentaculaires, etc.
La colonisation a donné le pouvoir aux vaincus de l’histoire africaineEn sauvant les dominés et en abaissant les dominants, la colonisation a bouleversé les rapports ethno-politiques africains. Pour établir la paix, il lui a en effet fallu casser les résistances des peuples moteurs ou acteurs de l’histoire africaine.
Ce faisant, la colonisation s’est essentiellement faite au profit des vaincus de la « longue durée » africaine venus aux colonisateurs, trop heureux d’échapper à leurs maîtres noirs. Ils furent soignés, nourris, éduqués et évangélisés. Mais, pour les sauver, la colonisation bouleversa les équilibres séculaires africains car il lui fallut casser des empires et des royaumes qui étaient peut-être des « Prusse potentielles ».La décolonisation s’est faite trop vite
Ne craignons pas de le dire, la décolonisation qui fut imposée par le tandem Etats-Unis-Union Soviétique, s’est faite dans la précipitation et alors que les puissances coloniales n'avaient pas achevé leur entreprise de « modernisation ».
Résultat, des Etats artificiels et sans tradition politique ont été offerts à des « nomenklatura » prédatrices qui ont détourné avec régularité tant les ressources nationales que les aides internationale. Appuyées sur l’ethno-mathématique électorale qui donne automatiquement le pouvoir aux peuples dont les femmes ont eu les ventres les plus féconds, elles ont succédé aux colonisateurs, mais sans le philanthropisme de ces derniers…Les vraies victimes de la colonisation sont les Européens
Les anciens colonisateurs n’en finissent plus de devenir « la colonie de leurs colonies » comme le disait si justement Edouard Herriot. L’Europe qui a eu une remarquable stabilité ethnique depuis plus de 20 000 ans est en effet actuellement confrontée à une exceptionnelle migration qui y a déjà changé la nature de tous les problèmes politiques, sociaux et religieux qui s’y posaient traditionnellement.
Or, l’actuelle politique de repeuplement de l’Europe est justifiée par ses concepteurs sur le mythe historique de la culpabilité coloniale. A cet égard, la chaîne Arte vient donc d’apporter sa pierre à cette gigantesque entreprise de destruction des racines ethniques de l’Europe qui porte en elle des événements qui seront telluriques.
Bernard LUGAN
(L’Afrique réelle)
contact@bernard-lugan.fr
[1] Jacques Marseille, Empire colonial et capitalisme français, histoire d’un divorce. Paris, 1984. Dans ce livre Marseille évalue le vrai coût de l’Empire pour la France.Lire : Osons dire la vérité à l’Afrique de Bernard Lugan
Rediffusé sur le site de l'ASAF : www.asafrance.fr
Source : www.asafrance.fr -
Colonisation : l’épopée européenne qui a changé le monde
Publié par Guy Jovelin le 27 décembre 2019
Par Pierre Boisguilbert, journaliste spécialiste des médias et chroniqueur de politique étrangère ♦ Ainsi, pour le président Macron, la colonisation est une erreur doublée d’une faute. On le savait déjà. Après son infamante sortie algérienne sur les « crimes contre l’humanité » prétendument commis par la France outre Méditerranée, il a cru bon d’en remettre une couche à Abidjan le 21 décembre.
La colonisation est une mondialisation
Juger moralement un mouvement historique inévitable, et sur lequel il est impossible de revenir, est stupide. Le monde a été colonisé par les Européens tout simplement parce qu’il ne pouvait pas ne pas l’être. L’énergie de la « race blanche » dans sa volonté de découverte et d’expansion a changé le monde pour toujours et à jamais, comme celle de la Horde d’or mongole avait changé la Russie. Il n’y a eu en fait dans l’histoire qu’une seule véritable mondialisation : la colonisation. Parfois, il est vrai, cruelle et prédatrice. Mais aussi porteuse de progrès et de santé pour les populations soumises, en même temps qu’elle faisait reculer l’esclavage, le cannibalisme et la sauvagerie. Son histoire, notamment pour la France, a révélé des hommes d’un courage exceptionnel mais également d’une grande humanité, et donné lieu à des épopées qui participent à la fierté de notre histoire.
Des générations de petits Français ont été élevées dans la gloire de l’empire, ils voyageaient devant les cartes de territoires immenses et éloignés réunis dans un rêve civilisateur et même multiracial. La repentance obligatoire fait partie de la perte de notre conscience nationale qui est à la base de notre déclin.
On rendra justice à l’homme qui renonce à son régime spécial de retraite d’avoir souligne que c’était une erreur de la République : « Trop souvent aujourd’hui la France est perçue avec un regard d’hégémonie où les oripeaux d’un colonialisme qui a été et qui fut une erreur profonde, une faute de la République…»
Le paradoxe de l’ex-colonisé
Macron croit à nouveau (adieu de Villiers !) que tout commence avec la République. C’est son droit mais c’est une ânerie incontestable. On retiendra donc que c’est plus l’erreur d’un système politique trahissant ses valeurs que d’un pays assumant son histoire. L ‘« erreur » de la République est souvent une page de gloire de la France. D’ailleurs c’est la République universelle qui a transformé la colonisation en un nivellement idéologique ; la France n’en demandait pas tant.
Que pense le président de notre premier empire, du Canada à l’Inde en passant par les Antilles et puis le Sénégal et l’Algérie ? La France a été, derrière son ennemi héréditaire l’Angleterre qui gouvernait les mers, la deuxième puissance coloniale du monde. Il lui reste la francophonie et un empire maritime gigantesque et prometteur autour d’archipels oubliés. Il est une génération de Français qui par la lâcheté de nos dirigeants, sont nés dans un empire et se préparent à mourir dans un hexagone. Un hexagone qui vit une ancienne fierté comme une honte.
Il est vrai que cette République ressemble peu à la France impériale de Faidherbe et Gallieni. Quand on voit les conséquences démographiques et humaines de la colonisation, on peut comme Macron penser que c’était une erreur — qui pourrait nous être fatale. S’il y a grand remplacement, c’est la fille bigarrée de la colonisation et de l’échec des colonisés à vivre mieux chez eux sans nous. Fuir son pays pour se réfugier chez l’oppresseur dont on se vante de s’être débarrassé, quel paradoxe !
Mais cette erreur était malgré tout inévitable. Pourquoi Colomb a-t-il découvert Amérique ? Parce qu’il en avait les moyens techniques et surtout le courage humain. La colonisation est la conséquence d’une supériorité matérielle, mais aussi d’un sentiment naïf d’apporter le progrès — une nouvelle « pax romana ». La colonisation est une conquête et toute conquête est une brutalité comme l’auraient dit les Gaulois acceptant cependant le terme de civilisation gallo-romaine. Une colonisation subie puis acceptée dans ses conséquences irréversibles. Voilà, avec l’acquisition de la langue française, le chemin de la vraie indépendance des colonisés qui ne seront plus jamais ce qu’ils ont été. L’Amérique latine ne retournera jamais à l’époque des Aztèques et des Incas, n’en déplaise aux indiens, et le Maroc n’effacera jamais Lyautey et Casablanca. Les pourfendeurs de la colonisation sont souvent des obscurantistes qui confondent régression et authenticité et qui ont trouvé le moyen de justifier leurs échecs pitoyables depuis 70 ans.
Pour eux comme pour nous, il n’y a finalement qu’une chose pire que la colonisation et c’est la décolonisation. Car la première était peut être une erreur, toutefois inscrite inévitablement dans la marche du monde, mais la seconde a multiplié les fautes évitables. Le « temps béni des colonies » est peut être un fantasme mais le temps maudit des décolonisations est, pour certains pays, une indiscutable réalité.
Pierre Boisguilbert
24/12/2019Source : Correspondance Polémia
Crédit photo : Domaine public